parquet | sparkles & mud @ mowno
De tous temps, il y a toujours eu quelque chose de fascinant à voir les musiques électroniques venir jouer des coudes avec le rock, que ce soit par l’intermédiaire de producteurs assez habiles pour imprégner leur electro de l’énergie des guitares, ou de groupes capables de retranscrire par leurs instruments la relation physique que le corps peut entretenir avec la musique. A l’instar récemment de La Jungle, en moins noise, de Electric Electric, en moins expérimental, et de MadMadMad, en moins psyché, Parquet l’a parfaitement compris. Aussi à l’aise sur une scène dont la taille lui importe peu et qu’il transforme illico en club, que dans une rave party dont l’assistance se retrouve soudainement grisée par la présence d’instruments, le quintet transforme l’essai d’un Ep prometteur sorti en 2017 avec un premier album qui pousse son mélange de techno abrasive et de rock expérimental à son paroxysme.
‘Ce qu’on met en avant, ce n’est pas ce qu’on fait, mais quand on le fait’ avance le groupe dès lors qu’il aborde l’essence de sa musique. Et pour cause, il ne suffit pas de confier les rudiments de l’electro aux mains de musiciens live pour que le tour soit joué. Contrôler l’auditeur, jouer avec son ressenti et ses émotions, provoquer une transe jusqu’à le télécommander et le faire lâcher prise à la faveur d’un beat, d’un groove sec ou de riffs demeure nettement plus intéressant, et c’est justement ce dont est capable la machine de guerre Parquet. Encore fallait-il à réussir à coucher cet indéniable savoir-faire au creux de sillons pour rendre l’écoute domestique toute aussi fascinante.
En neuf coups de latte bien poncés, Parquet passe ici haut la main l’étape cruciale du studio et évite le piège béant du ‘bon petit groupe à voir en live’. Rondement mené, et avec juste ce qu’il faut de relief pour servir autant sa cause que sa musique, la formation opte pour une apparente simplicité derrière laquelle se planquent une multitude de détails, le tout avec une production et une spontanéité qui laissent opérer la magie jusque dans notre salon. Difficile en effet de ne pas sentir ses cervicales se mettre machinalement en branle dès le disque et son intro de huit minutes lancés. Alors, comme aimantés par la batterie du solaire chef d’orchestre Seb Brun, tous les éléments de l’univers Parquet apparaissent, évoluent, vont et viennent au gré des envies, des humeurs et des besoins; se superposent, se dissocient, ou se complètent au gré de musiciens tirant chacun leurs ficelles, tels d’habiles marionnettistes dont nous serions les jouets.
Accessible et digeste mais toujours imprévisible, le groupe s’est laissé le temps de murir pour s’extraire des clichés et se montrer efficace en toute circonstance. Massif quand il opte pour l’intensité du noise rock (Brute) ou la finesse du math rock (Mud), flottant dès lors qu’il fait respirer ses compositions (Tahiti) ou ralentit le rythme, Parquet fait de Sparkles & Mud un parfait compromis pour ceux qui n’ont jamais pu choisir entre l’énergie du rock et la transe de l’electro. S’abandonner au plaisir plutôt que se morfondre dans un quotidien suffocant, rassembler plutôt qu’opposer… Sans même en être conscient, Parquet vient peut être d’accoucher là d’un excellent remède à notre société plus que jamais moribonde.